1790 – ‘No Song, No Supper’: "Knocking at this hour of day" (Trio) [AUDIO]
Seul opéra anglais de Stephen
Storace à avoir survécu dans une partition orchestrale, l’afterpiece (pièce ou opéra donné en
seconde partie de soirée) No Song, No
Supper (Pas de chanson, pas de souper) eut un succès ininterrompu durant
toute la carrière de sa sœur, Nancy Storace, pour laquelle il
tailla le rôle de Margaretta. Elle contribua d’ailleurs à faire de ce
personnage l’un des plus marquants de son répertoire, pour le public d’alors.
Sa vivacité scénique et ses talents comiques devaient beaucoup ajouter à une
partition relativement simple… mais dont la simplicité même fit beaucoup pour
la longévité de l’ouvrage.
On trouvera une présentation générale de cet opéra dans la miscellanée ‘No
Song, No Supper’, opéra de Stephen Storace (1790) et des compléments d’information
ici.
Synopsis général
Deux marins, Frederick
et Robin, font naufrage près de chez eux. Ils espèrent pouvoir revoir leurs
amantes, Louisa Crop et Margaretta, et se rendent chez le fermier Crop, père de
Louisa. Dorothy, la seconde épouse du fermier, est éprise de l’homme de loi
véreux Endless, qui a déjà contribué à séparer les amants. En l’absence de son
mari, elle lui prépare un souper, consistant en un rôti et un gâteau, ce dont
Margaretta (qui passe pour une chanteuse des rues) est témoin. Alors qu’Endless
s’apprête à manger, Crop frappe à la porte. Endless se cache, et le souper est
dissimulé. Margaretta chante une ballade, dont le premier couplet révèle la
cachette du rôti, le second, celle du gâteau, et le troisième, la cachette
d’Endless. Il est chassé et le couple de fermiers se réconcilie. Robin et
Frederick, devenus riches grâce à un tonneau d’or sauvé du naufrage, peuvent
désormais se marier, et annoncent la bonne nouvelle. (d’après Jane Girdham (1997), p. 178)
La partition
Stephen
Storace recycla une partie de ses opéras italiens écrits pour Vienne dans ses
ouvrages anglais. Ainsi, le trio « Knocking
at this hour of day » est tiré du finale de Gli Equivoci (Les Méprises),
opéra datant de 1786, au livret inspiré de La
Comédie des Erreurs de Shakespeare. En témoigne le ténor Michael
Kelly dans ses Reminiscences :
Le
trio s’insère juste après l’air « A miser bid to have and hold me »
chanté par Margaretta. Le personnage explique alors quel est son triste sort,
avant de demander aide et protection aux habitantes de la chaumière (où l’on va
bientôt apporter le souper du titre).
Nelly (Ann Hetherington,
mezzo-soprano)
Margaretta (Lisa Milne, soprano)
Dorothy (Elizabeth McCormack, soprano)
BBC Scottish Symphony Orchestra, Harry
Bicket (dir.). 1996.
Traduction française :
Margaretta :
Mon vieux père ne sait pas où je me
trouve – Bon sang, c’est sa faute à lui ; car s’il m’avait laissée
épouser Robin, je ne me serais pas enfuie, mais il voulait me faire épouser
un vieux idiot comme lui-même, uniquement car il était riche ; mais que
sont les richesses comparées à l’amour ? Je le détestais, et n’en aurais
pas voulu même s’il avait été farci de diamants. En plus, je savais
que c’est à cause de lui qu’on a fait un procès à Robin, ce qui l’a fait me
quitter. – Si j’aspirais à la richesse, j’aurais pu l’être depuis longtemps.
N’ai-je pas refusé de nombreux soupirants, bien vrai ! Et je le ferai
encore, car je n’aime personne d’autre que Robin ; et pour l’avoir, je
quitterais bien cinquante pères. Je pense que personne ne peut me reconnaître
dans ce déguisement ; pourtant, je vais abandonner ma vêture de
chanteuse des rues et demander une aide plus honnête / chercher un emploi
plus honnête, jusqu’à ce que j’apprenne le retour de Robin—mais mon panier
est vide, et il est grand temps de chercher un asile pour la nuit—voici une
chaumière—quelle chance –je vais essayer ici. (Elle frappe à la porte)
Nelly,
puis Dorothy, qui se joignent à Margaretta en un Trio.
Nelly :
Frapper
à cette heure,
Que
voulez-vous donc, ma fille ?
Margaretta :
Une
étrangère devant votre seuil amical,
J’implore
un asile pour la nuit.
Nelly :
Mendier
est un métier détestable,
Je
crains que vous ne trouviez que peu d’aide,
Mais
restez, je vais demander, et vous le dirai.
Margaretta :
Hélas !
J’ai bien que ce ce soit vrai,
Une
mendiante récolte le dû de la mendiante,
Quoiqu’vrai
soit son indigent récit,
Un mendiant récolte le dû du mendiant.
Dorothy :
Tu
dois filer, nous sommes seules,
Et
un asile ne pouvons te donner.
Margaretta :
Mes
pieds douloureux ne me portent plus,
Un
peu de paille est à quoi j’aspire.
Dorothy :
Le
village est à cinq lieues là-bas,
Je
me demande ce que la fille aurait.
Nelly :
Le
village est à cinq lieues etc
Margaretta :
Misérable
que je suis, dois-je y aller ! Oh, ayez pitié.
Dorothy :
Va,
fiche le camp, égyptienne, allez,
Nous
t’avons dit que tu ne peux rester—
Nelly :
Quelle
impudence,
Va-t-en,
trainée, hors d’ici.
Margaretta :
Oh !
Laissez-moi rester, car la pauvreté n’est pas un pêché,
Et
c’est trop tard pour trouver le chemin.
(Nelly
et Dorothy rentrent dans la maison.)
Margaretta, seule :
Maintenant, si je suis une femme, il
y a quelque diablerie là-dessous, deux femmes seules et qui refusent la
compagnie d’une troisième, afin de rester seules ; Oh ! C’est
impossible. Je vais découvrir pourquoi avant de partir—qui vient par ici ?
Un homme—je vais me retirer de côté, et voir si elles sont aussi peu
charitables pour une veste et un gilet que pour des jupons. (Margaretta se cache.)
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Fac-similé du livret imprimé en 1792, à Dublin :
Bibliographie
Jane
Girdham, English Opera in Late Eighteenth
Century London. Stephen Storace at Drury Lane. Oxford, Clarendon Press,
1997.
Roger
Fiske, No Song, No Supper: Opera: Full
Score: Musica Britannica Vol. 16.
Stainer & Bell Ltd, 1959.
Il
n'existe à ce jour aucun enregistrement commercial de cet opéra.
No Song, No Supper fait l’objet des pages 188 et 189
de la biographie de Nancy Storace,
par Emmanuelle Pesqué.
Savoureux ! Merci de nous faire connaître davantage Nancy et Stephen.
RépondreSupprimerMerci ! :-D
RépondreSupprimerLa prochaine miscellanée sera un témoignage d'un éminent voyageur (alors connu dans toute l'Europe) sur l'art de Nancy Storace (et sur 'No Song, No Supper'), mais ensuite nous allons faire un petit tour en Italie en 1782...