1797 – Nancy Storace chante Mozart à Paris !

Alors que Mozart restait un compositeur encore très peu joué à Paris, en 1797, durant l’un de ses premiers concerts parisiens, Nancy Storace a interprété un duo de Mozart ! On n’en sait pas davantage, car l’annonce de ce concert est peu détaillée :

Nancy Storace chante Mozart à Paris en 1797 lors d'un concert

Annonce parue dans Le Conservateur du 22 Vendémiaire an VI (13 octobre 1797) 

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Dans le programme de ce concert du 25 Vendémiaire an VI (16 octobre 1797), programmation de ce concert, Mozart voisine iavec Haydn, Pétrini, Paisiello, Tritta, Rode, Méhul et Devienne, ce qui donne une bonne idée des compositeurs susceptibles d’attirer du public. La scena et l’aria buffa non identifiées, chantées par Storace, étaient-elles de compositeurs moins attractifs ?

Durant l’année 1797, si 8 partitions de Mozart sont éditées à Paris, on n’entend sans doute dans les concerts publics que l’ouverture de Die Zauberflöte. (Voir l’article de Jean Gribenski et Patrick Taïeb, Chronologie des exécutions, éditions et représentations lyriques de Mozart (176-1829) dans Mozart et la France, de l’enfant prodige au génie (1764-1830), Ed. Symétrie (2014).) L’œuvre de Mozart est encore très mal connue des Parisiens.

 Duo buffa de Mozart chanté par John Braham et Ann Selina Storace à Paris en 1797

Évidemment, à la lecture de cette annonce, on pense immédiatement à un extrait des Noces de Figaro (éventuellement plus ou moins transposé), opéra que la cantatrice avait créé ; mais la partition de Don Giovanni n’est pas à exclure, car elle avait circulé à Londres en 1789. Nancy Storace avait même inséré un air de Don Giovanni dans un opéra qu’elle avait chanté au King’s Theatre en février 1790, La Villanella rapita. On sait qu’elle avait interprété, avec John Braham, des extraits des Nozze di Figaro en 1802 à Londres lors d’un concert.

Était-ce le premier concert du couple donné dans le théâtre de Madame Montansier ? « La signora Storace chantera un aria buffa, redemandée » fait manifestement allusion à un précédent succès au concert et à un air reperé et apprécié des amateurs, mais était-ce dans le même théâtre ou lors de sa toute première apparition parisienne triomphale, non loin du Palais Royal, au Théâtre de la République loué par la Montansier ?

 

Accompagnée de son amant, le grand ténor John Braham, Nancy Storace arrive à Paris en septembre 1797, à l’époque du coup d’état du 18 Fructidor an V (4 septembre). Mademoiselle Montansier n’est probablement pas étrangère à ce voyage. En effet, la cantatrice est en relation avec cette très dynamique entrepreneuse théâtrale, alors propriétaire du Théâtre Montansier, l’ancien Théâtre des Beaujolais, sis sur l’emplacement actuel du Théâtre du Palais Royal.

 

Vue en coupe du théâtre Montansier   (Anciennement attribué à Pierre-Louis Moreau-Desproux (1727-1794) :  Nancy Storace y a chanté - Musée Carnavalet

Vue en coupe du théâtre Montansier (anciennement attribué à Pierre-Louis Moreau-Desproux (1727-1794))

Musée Carnavalet © Paris Musées.

 

Nancy Storace y a chanté Mozart en 1797: foyer du Théâtre Montansier
Foyer [du théâtre] Montansier, dessin de Louis Binet (vers 1798-1799)

BnF Gallica)

 

Nancy Storace y a chanté Mozart en 1797 : foyer du Théâtre Montansier au Palais Royal
Foyer du Théâtre Montansier, estampe de Dorgez ou Dorgès (sans date).

Musée Carnavalet © Paris Musées.

 

Mademoiselle Montansier devait connaître Nancy Storace depuis longtemps, car elle avait déjà tenté de la recruter pour des entreprises bien différentes, en 1787 et 1788.

Ses liens avec les Storace se manifestèrent aussi par la programmation de l’opera buffa de Stephen Storace, Gli Sposi Malcontenti (créé à Vienne en 1785), donné sous forme de « parodie » et renommé Les Epoux mécontents, pour l’ouverture du Théâtre Montansier, agrandi et rénové par l’architecte Victor Louis.

 

Avant sa transformation en Théâtre Montansier, la salle du Théâtre des Petits comédiens du bois du Comte de Beaujolais (avant 1787-1789) - Suite de onze planches pour un almanach. (© BnF Gallica)

 

C’est aussi sous l’égide de Mademoiselle Montansier que le couple Ann Selina Storace – John Braham s’était produit en concert au Théâtre de la République (sur le site de l’actuelle Comédie Française), le 28 septembre 1797. Alors que la presse parisienne est peu prolixe en annonce de concerts et de comptes rendus, on a gardé trace de ce triomphe qui dû être mémorable. On y soulignait que la cantatrice possédait :

Un timbre aussi sonore que flatteur ; une pureté et une justesse inconcevables soit dans le grave, soit dans l’aigu ; une méthode de chant aussi savante que soignée et approfondie ; un art extrême à cacher sous les grâces de l’expression, la difficulté des tournures ; un coloris admirable de sensibilité sur l’ensemble : telles sont les richesses que madame Storace a développées avec une profusion extraordinaire.

Les Parisiens furent-ils sensibles à son interprétation mozartienne ? Pour l’instant aucun compte rendu n’en a été retrouvé, et la date et le détail de ce concert n’avaient pas été publié.

 

Vous en saurez davantage sur les raisons de l’engagement

de Nancy Storace par Madame Montansier dans

Nancy Storace, Muse de Mozart et de Haydn, pages 246-250.

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